Dimanche 9 mars 2025 – 1er dimanche de Carême
“Dans l’Esprit, il fut conduit à travers le désert où, pendant quarante jours, il fut tenté par le diable.“ Luc 1, 1-2- Lecture du livre du Deutéronome (26, 4-10)
- Psaume 90 (91)
- Lecture de la lettre de saint Paul apôtre aux Romains (10, 8-13)
- Evangile de Jésus Christ selon St Luc (4, 1-13)
La tentation de Jésus : Etre fils de Dieu, la tentation de la toute-puissance.
Le récit de la tentation de Jésus nous est raconté par les trois évangiles synoptiques : Marc, Matthieu et Luc. Dans les trois récits, la tentation au désert est liée au baptême du Christ et c’est l’Esprit Saint, reçu au baptême, qui pousse Jésus au désert. L’autre lien qui unit fortement nos trois évangélistes, c’est le fait que le diable reprend par deux fois le titre reçu au baptême par Jésus, en le mettant en doute : « Si tu es le fils de Dieu ? ».
Jésus est le Fils de Dieu, il est rempli de l’Esprit Saint, que va-t-il faire de cette filiation ? Nos trois évangélistes vont alors diverger quant à la lecture qu’ils font du récit de la tentation et chacun va insister sur un point différent. Que nous font ils découvrir ? Il faut relire l’Ancien Testament !
I/ Trois visions du même évènement.
A/ Marc : la re-création. En nous renvoyant à la fin de son évangile à Is 11, Marc fait clairement allusion au message d’Isaïe (Is 11) : le Messie va recréer le monde et rétablir l’humanité dans son harmonie première.
B/ Matthieu : un nouvel Exode. Matthieu, lui, fait dialoguer Jésus et le Diable avec des citations des Psaumes et du Deutéronome. Il nous fait entrevoir Jésus comme le nouveau Moïse, le nouveau libérateur et sauveur d’Israël. Jésus est celui qui réussit à vaincre les tentations du désert pour nous conduire au Royaume et à la terre promise.
C/ Luc : une anticipation de la Passion. Luc, quant à lui, nous projette déjà dans la passion. En notant que le diable s’en va pour revenir « au moment fixé », il nous oblige à nous projeter sur la dernière tentation du Christ, quand le diable revient à la fin de l’évangile et qu’il s’empare de Judas. A Gethsémani, Jésus doit vaincre l’ultime tentation : échapper à la mort et sur la croix, ne pas user de la toute-puissance de Dieu : « Si tu es le roi des juifs, sauve-toi toi-même. Disent les soldats ; si tu es le Messie, sauve-toi toi-même et nous aussi dit l’un des malfaiteurs. » Lc 23,37.39.
II/ La tentation nous révèle le sens de la divinité du Christ.
Saint Luc est le seul à nous mettre la généalogie de Jésus entre le baptême et le récit de la tentation. Il nous dit que Jésus est Fils de Dieu, mais qu’il est aussi fils de David, fils de l’humanité. Jésus est roi, messie, vrai Dieu et vrai homme, mais que va-t-il faire de sa filiation ?
La tentation de Jésus nous révèle que Jésus ne va pas utiliser la toute-puissance de Dieu pour imposer sa volonté aux éléments (1ère tentation), au monde (2ème tentation) ou à Dieu (3ème tentation). Non, Jésus va se mettre dans le chemin d’un Messie qui emprunte la toute-puissance de la Parole (1ère tentation), la toute-puissance de l’humilité (2ème tentation) et la toute-puissance de l’abandon aux mains de Dieu (3ème tentation). Jésus révèle ainsi le chemin qu’il va emprunter et qui va le conduire à la croix. Oui, il est Dieu, Fils de Dieu, mais ce n’est pas le chemin de la toute-puissance qu’il va prendre, c’est celui de l’abandon, de l’humilité, de l’humanité qu’il va emprunter.
III/ Un chemin que nous avons aussi à emprunter.
Au baptême, nous sommes nous aussi devenus fils de Dieu. Nous aussi, nous sommes pleins de l’Esprit Saint reçu au jour de la confirmation. Nous aussi nous sommes immortels et entrés dans la vie éternelle. Mais, comme Jésus nous seront nous aussi tentés dans la vie. Le chemin que nous devons alors suivre face aux tentations, c’est le même chemin que le Christ : celui de l’humilité, celui de l’abandon, celui qui refuse la toute-puissance pour se mettre au service de la Parole, au service de l’homme. C’est un chemin qui refuse d’imposer sa loi à Dieu et aux hommes mais qui passe par l’amour et par donner sa vie pour ceux qu’on aime. Voilà,
le chemin du Christ, voilà le chemin de l’Eglise et des baptisés. Le suivons-nous toujours ? Bien souvent, non ! Mais en ce temps de carême, saint Luc est là pour nous rappeler que si nous voulons être appelés fils de Dieu, le seul chemin est celui qu’a emprunté le Christ avant nous.
P. Damien Stampers du diocèse de Blois